Notre remontée de l’Amazone de Manaus à la frontière Peruano-Colombiano-Bresilienne à bord d’un rafiot public a été l’occasion de découvrir non seulement cette région de monde méconnue, mais surtout ses habitants. Récit, minute par minute, d’un voyage au delà de l’ennui.
JOUR 1
13h30 : Une petite barque nous dépose au pied de l’Itapuranga III (ce qui signifie que le 1 et le 2 ont déjà coulé – petit score car il y a certains bateaux qui en sont au numéro 7…). Le bateau est déjà bien plein. La partie basse est remplie de marchandises en tous genres (frigos, mobylettes, œufs,…). Mais nous sommes surpris de constater que le pont intermédiaire également. Les deux hamacs que nous avons placé ce matin à 9h00 sont perdus au milieu d’une véritable foret de hamacs, de toutes les couleurs et tous les styles. Sous ces bouts de tissus suspendus, bagages et marchandises forment une couche hétérogène d’à peu près un mètre de hauteur. Ambiance.
13h45 : Essai des hamacs et prise de conscience que la surface de notre espace vital sur cette semaine sera restreinte. Il fait une chaleur suffocante et l’air a du mal à pénétrer dans la partie centrale ou sont suspendus les quelques 150 hamacs.
13h50 : Greg fait connaissance avec sa voisine au hamac rose, tandis que Catherine s’engueule – déjà - avec son voisin de derrière (le ‘papy’) qui a profité de notre inattention de quelques secondes pour amonceler toutes ses affaires sur les notres et sous nos hamacs. On ne peut plus poser un pied par terre.
16h00 : Le bateau devrait être parti depuis une heure déjà, mais il reste encore 2 camions de bière à charger, pack de 6 canettes par pack de 6. On n’est pas partis !
16h09 : Nous montons sur le pont supérieur ou la musique recouvre les commentaires d’un match de foot. Samba et football : le cocktail brésilien plus fort que la caipirinha !
17h00 : Le chargement de bière continue. Encore un demi camion. Le soleil se couche sur l’eau couleur café du Rio Negro au son du karaoké toujours branché sur le niveau sonore d’une boite de nuit. Un petit garçon fait voler son cerf-volant devant Manaus, profitant d’une petite brise, tandis que trois petites filles jouent à la poupée. Attente. Les bateaux mettent près d’une semaine à être chargés et plusieurs jours à être déchargés.
17h32 : Il ne reste que 45 packs de SKOL à charger. Le départ parait imminent. Sur le quai, quelques personnes sont venues accompagner la famille. On accompagne les passagers comme on accompagne un parent pour un long voyage. Six a dix jours pour s’enfoncer davantage dans la foret amazonienne. Comme en Russie avec le transsibérien, les gens voyagent en transamazonien, le chemin de fer ici se compose d’eaux aux diverses teintes.
17h50 : Mais qu’est-ce qu’ils foutent ! Ca fait déjà 20 mn que la bière chargée commence à être déchargée rapidement dans les gosiers des amateurs de la buvette du pont supérieur
18h05 : Nous contribuons également à l’allégement de la cargaison de bière en admirant le calme s’installer sur le port, devant Manaus dominée par la coupole de l’opéra Amazonas, construit en 1896 sur le modèle des théâtres français.
18h15 : Greg vient d’apercevoir une antenne satellite sur le toit du bateau. Il jubile : Rien de mieux pour mater l’Euro 2008 de foot que être fourré au fin fond de l’Amazonie ! Il fonde de grands espoirs sur le match France-Italie après la débandade nationale contre la Hollande.
18h17 : Greg, soudain en verve, et excité comme un pou, devient poète et lance une tirade sur la beauté des nuages qui roulent sur un horizon ouvert à l’infini. Que la camera nous manque ! (Elle a déjà du germer dans la foret de Rio et faire des petits – cf. un article précédent). Les images de chaque instant sont fabuleuses : la vie du fleuve, les couleurs, les paysages, les gens, et l’atmosphère du bout du monde et des voyages au long cours qui ont rarement cours en ces temps modernes sont autant de sujets qui auraient régalé notre camera de débutants.
18h21 : Un moussaillon vient de détacher les amarres de la proue.
18h22 : Une chauve-souris noire pénètre le pont intermédiaire et slalome entre les centaines de hamacs.
18h23 : Un éclair zèbre au loin le ciel de l’Amazone, véritable kaléidoscope allant du noir au bleu.
18h24 : Manaus a déjà disparu, non pas au large, mais derrière un énorme nuage de fumée noire s’échappant du moteur de l’Itapuranga III. La nuit est tombée et nous dépassons les îlots éclaires de 3 stations-service flottant tels des nénuphars. Au loin, une énorme porte-containers est stationné à plusieurs centaines de mètres de la rive de cette gigantesque autoroute qu’est l’Amazone.
18h50 : Demi-tour. On rentre déjà ? Le capitaine a l’air de chercher quelque chose dans l’eau avec son phare puissant. Une palette de bière ? Un homme à la mer ? En fait, nous avons juste oublié le mécanicien trop occupé à compter fleurette à sa nouvelle target quand nous avons appareillé. Il arrive sur une pirogue à moteur dans la nuit et saute à bord prestement. Ouf ! Nous sommes sauvés !
19h27 : Autour de notre bateau volent canettes et autres emballages plastiques qui mettront plus de 200 ans à se décomposer et tueront quelques dauphins d’eau douce d’ici là avant de s’attaquer à leurs cousins de la mer. Aller jusqu'à la poubelle pourtant située à 5m n’est pas un geste ancre dans les mœurs. Au Brésil, on jette. Par les fenêtres, dans la mer, dans Amazone, sur la plage. L’immensité – et les pauvres – se chargent du nettoyage. Et dire que nous sommes pourtant dans un pays soi-disant à la conscience écologique développée !
20h00 : Apres deux sandwichs mixto (croque-monsieur local), nous contemplons une dernière fois les ombres chinoises de la foret déjà dense qui dansent sur les rives du fleuve. Les nuages qui drapent le ciel nous invitent à aller nous coucher.
20h22 : A coté (ou au dessus, c’est selon le point de vue) de nos hamacs, nous découvrons l’unique spécimen occidental du bateau. Un anglais aux dreadlocks de 2m de long, illuminé et qui nous assure dans un portugais hésitant avoir oublié sa langue maternelle. Il voyage depuis 3 ans et demi et ne compte pas s’arrêter de sitôt. C’est aussi ce genre d’extra-terrestre que l’on rencontre en voyage.
JOUR 2
6h00 : Un appel micro nous tire de notre sommeil malgré nos boules quies. Le petit dej est prêt. Nous avons cru que nous coulions (pas si rare visiblement). Nous n’avons pas dormi comme des louard (ahahaha – on ne l’a jamais faite). Non pas le confort du hamac. Au contraire. Mais nous sommes confrontés à un problème nouveau et du à la promiscuité : les voisins qui se balancent créent une onde qui se propage au hamac voisin qui se balance à son tour et ainsi de suite pendant toute la nuit ! Nous n’avons pas arrêté de nous cogner l’un à l’autre…
6h15 : Petit dej frugal : un café et quelques biscuits durs comme du béton. Heureusement nous avons pris des céréales à Manaus ! Catherine regrette juste le Nutella qu’elle n’a pu trouver à Manaus.
6h30 : Retour au nid, après un slalom spécial entre les hamacs soigneusement disposés en plein milieu du passage. De toutes les façons, il n’y a pas un espace de libre. Le slalom est corsé par les petites voitures des enfants que nous évitons d’ecraser.
10h35 : Greg est – déjà – tenté par un sandwich mixto (mixto tout court pour les intimes)
11h00 : Encontro das Aguas. Nous quittons le Rio Negro pour remonter les eaux blanches du Rio Solimoes (appelée ainsi en amont de Manaus par les Brésiliens). Les deux fleuves se rejoignent dans une arabesque noire et blanche. Leurs eaux, aux propriétés chimiques, aux températures, et aux couleurs différentes, s’entremêlent sans se mélanger sur près de 60 km. Tableau irréel, que de nombreux dauphins d’eau douce viennent animer de leur apparition.
11h07 : Nous dépassons une péniche, ou plutôt un convoi de plusieurs barges remplies à rabord poussées par un remorqueur qui étouffe sous l’effort. Voitures, bonbonnes de gaz, pétrole… tout est convoyé par le fleuve !
11h09 : Panique ! Greg vient de se rendre compte que le bar à ‘Mixto’ est fermé. Il attend midi comme l’heure du saint sacrement. Mais la ponctualité au Brésil est une notion que même les Suisses n’auraient pu importer. 5mn peuvent aussi bien être une heure, une demi journée ou plus !
11h30 : En réalité le déjeuner est déjà servi. Les passagers choisissent soit de manger dans leur gamelle sur leur hamac ou par terre, ou alors de faire la queue pour profiter de la minuscule pièce qui fait office de réfectoire. Menu unique pour tout le trajet : Pâtes, riz, feijoada, et viande. Nous ne sommes pas à plaindre.
12h48 : Catherine tape la discute (en portugnol SVP) avec le capitaine. Echange de propos techniques : Nous remontons l’Amazone à 7,5 km/h pour parcourir un peu plus de 1 000 km en 6 jours. 18 000 litres de carburant sont nécessaires pour effectuer l’aller-retour (une semaine pour remonter le fleuve, 3 jours pour descendre son cours). Juin est la saison des hautes eaux : 19 m sous le bateau pour une largeur de fleuve de 3km. Quel débit ! L’aiguille de notre boussole indique plein ouest.
13h13 : lorsque Catherine redescend, tout est calme à l’étage des hamacs. C’est l’heure de la sieste. Seuls quelques ronflements rompent le silence.
15h30 : nous sommes complètement endormis, ensuqués par la chaleur et le manque d’air. Pourtant la vie sur le bateau a repris. Chacun y va de sa serviette de bain, de sa brosse a dents, se parfume, s’agite et organise son espace vital après déjà 24 heures de vie commune.
16h00des nuages qui crachent des éclairs intermittents. Le pont est plein de vie, les enfants courent partout, les passagers profitent de la fraîcheur du soir et nous du spectacle.
20h30 : nous réalisons que nous avons raté le dîner servi ici a 17h. Heureusement qu’il y a toujours un petit mixto à se mettre sous la dent !
JOUR 3
7h30 : il n’y a pas eu d’annonce pour le petit dej aujourd’hui et il est terminé depuis une bonne heure quand nous nous réveillons comme des fleurs.
7h40 : Nous terminons le paquet de gâteaux entamé la veille, ainsi que 2 mandarines délicieuses. Les oranges en revanche tirent la gueule, se décomposent et laissent s’échapper un jus qui a goutté sur le hamac de Catherine toute la nuit. Pot pourri naturel !
8h00 : Nous replongeons béatement dans le sommeil, trop fatigués par notre première session de lecture de 15 minutes.
12h15 : In extremis, nous pénétrons dans le cagibi qui fait office de salle à manger avant que le service de midi ne se termine. Menu habituel, froid. Les passagers se ruent sur les plats et avalent le contenu de leur assiette comme des morfales. Nous ne serons pourtant jamais à court de vivres.
13h00 : Retour, comme tout le monde, vers nos hamacs. C’est l’heure de la sieste. Le dentier du voisin de Catherine (le papy) nage dans son bocal.
15h00 : Nous montons sur le pont, il fait chaud. Le paysage est monotone. L’événement de la journée doit être notre passage à Tefe, prévu entre 15h et 19h.
16h09 : Nous avons visiblement déjà passé Tefe mais nous ne l’avons pas vu.
19h00 : le bateau continue inlassablement sa remontée des eaux qui s’écoulent à 3,5km heure en direction de l’Atlantique. Le pilote de ce rafiot datant de 1928 nous parle de ses enfants et de sa retraite qui approche à grands pas.
JOUR 4 (déjà !!)
entre passagers se sont déjà noués et ceux qui restent à bord saluent leurs compatriotes qui descendent dans le petit port ou les attendent motos et taxis qui les emmènent au loin sur une piste rouge.
11h30 : le bateau repart pour 10 heures de navigation avant la prochaine halte.
14h00 : Greg louche. Un œil sur son livre, et un œil sur sa montre. Le balancement un peu trop nerveux de son hamac trahit une anxiété incompréhensible.
14h30 : Ca y est, le mystère est levé. En fait le match de foot France-Italie démarre dans 15 minutes. Greg monte sur le pont pour réserver sa place au premier rang.
14h46 : Greg redescend bredouille et le visage dépité. Une putain de tele-novela est diffusée à la place match de foot sur l’unique chaîne captée par l’antenne. Il s’enfonce irrémédiablement dans une lente et profonde déprime.
20h10 : Apres avoir dégusté les traditionnels mixtos (nous sommes passés à 2 par personne), Catherine note la recette du Ceviche qu’un péruvien lui transmet comme un secret mystique. Les cartes volent sur la table de jeu. La TV diffuse les images diffuses d’une enieme tele-novela. Les enfants ont inventé une course d’obstacles avec toutes sortes d’objets.
21h08 : Arrivée dans un port. Déchargement de marchandises, descente et surtout montée de passagers. C’est de nouveau la foire d’empoigne. Les ‘résidents’ du navire défendent un espace vital cruellement gagne au fil des jours : c’est la lutte !
JOUR 5
4h00 : Catherine se retourne pour la enieme fois dans son hamac, réveillant Greg au passage. Impression d’avoir le dos aussi contracté et tendu que les câbles de nos hamacs. La nuit a été dure. Beaucoup de bruit, d’autant plus que nous avons perdu nos boules quies. Qui plus est, le hasard a fait que nous sommes installés juste en dessous des 2 lampes de secours qui restent allumées toute la nuit. 5h, 6h. Impossible de dormir : il fait froid. Cette nuit, le papy (définitivement devenu un ennemi) a gesticulé toute la nuit sans relâche, balançant Greg contre un poteau. Greg est épuisé, les yeux cernés. Il accuse Catherine de l’avoir également bousculé cette nuit. Et pour cause : le manque de place a obligé Catherine à déguster les franges du hamac de Greg (NDLR : les hamacs brésiliens se repèrent à leurs franges, décorations qui volent au vent, se coincent dans toutes les excroissances et donnent un aspect plus romanichel à l’installation. Sous le coup de l’énervement, nous zappons le petit dej et avalons à la main les céréales crues.
8h00 : L’esthéticienne du bateau (et oui, avec l’équipage de marins il y a aussi une esthéticienne) s’est installée pour opérer à cote des toilettes et au dessus des poubelles. Le doigté de son maquillage et ses produits odorants ne peuvent faire oublier les effluves. Peu importe les clientes se précipitent quand meme.
8h30 : Une voisine de 3 tonnes 5 déballe un sac de vêtements, intéressant immédiatement les femmes des hamacs alentours. On tâte, on regarde, on soulève, et surtout on marchande. La négociation s’avère difficile : une acheteuse souhaite 3 T-Shirts pour 20 réais mais la vendeuse ne propose 2 pour 45. C’est qu’elle a le sens des affaires ! Elle n’est pas prête à céder a n’importe quel prix les vêtements qu’elle a rapportés de Fortaleza pour les vendre sur les bords de l’Amazone. Comme le transsibérien, le navire est un véritable supermarché et le moyen d’approvisionner des contrées fort reculées. Le bateau est attendu partout ou il fait escale et on se demande ou vont les passagers qui en descendent : combien de temps vont-ils encore poursuivre leur voyage avant d’arriver à destination ? Combien de pirogues, camions, motos prendront-ils ? Ou vivent-ils ? Notre imagination déploie sa créativité dans cet univers infini et inconnu.
9h00 : La valse des hamacs débute et nous sommes sur nos gardes pour défendre notre position, tels de vrais chevaliers du Moyen-âge, prêts à bouter l’étranger hors de sa forteresse. Objectifs : s’éloigner de quelques centimètres du papy balanceur et gagner un peu d’espace afin de pouvoir mettre pied à terre quand nous descendons de notre hamac.
9h03 : le coup d’envoi est lancé. Que les plus rapides gagnent !
9h04 : Le jeux sont faits ! Le papy qui avait trop bien fixé son hamac est contraint à l’immobilité. Première défaillance de sa part depuis 5 jours. Greg a gagné 10 centimètres du coté gauche. Victoire ! Quant à Catherine, c’est encore mieux : elle occupe un double espace. Mais que se passe-t-il ? Non !!!!! Ce n’est pas possible ! Qu’est-ce que…Victoire a la Phyrrus : un homme à la mine patibulaire vient s’installer pile au dessus d’elle, lui laissant généreusement 50 centimètres au dessus de son hamac.
12h00 : Tandis que la halte de 30 minutes se prolonge depuis 3 heures, nous filons vers le réfectoire, fidèles à notre dicton : "Mieux vaut manger froid que de faire la queue"
13h25 : Cales dans nos hamacs, nous nous abandonnons dans la lecture des 17 bouquins que nous avons vaillamment portes dans nos sacs en prévision de ce trajet. Lorsque Catherine lève les yeux, elle jouit d’une vue imprenable sur le gros orteil à l’ongle incarné de son nouveau voisin.
14h07 : Le déchargement du bateau continue, barre de fer par barre de fer. Il y en a des milliers dans la cale. Des barres de fer, toujours des barres de fer.
17h00 : Ca décharge toujours, alors que la lumière devient de plus en plus belle, éclairant les grands arbres de teintes rosées et les reflétant dans les eaux de l’Amazone, à cet endroit aussi calmes que celles d’un lac de montagne. Les pêcheurs rentrent au village munis de poissons de toutes sortes. Les villageois tendent des billets de 5 Reais (2 euros) et reçoivent une dizaine de beaux poissons en échange.
17h30 : Nous descendons dans la cale, ou l’un des enfants du bateau pêche à l’aide d’un fil de nylon, d’un hameçon avec des bouts de gras en guise d’appât. A peine le bout de gras a-t-il effleuré la surface de l’eau que les poissons se jettent sur hameçon C’est un véritable ballet autour de appât
20h10 : Nous montons sur le pont supérieur, car ce soir, c’est LE grand soir sur le bateau. Il y a un match de foot Bresil-Argentine retransmis à la TV, et la foule est rassemblée pour cet événement. Soucieux de repartir les risques, Greg arbore un T-shirt aux couleurs de l’Argentine (le seul de propre qui lui reste à vrai dire) tandis que Catherine affiche celles du Brésil En attendant le match, certains tuent le temps autour d’un poker endiablé. Nous parions à notre tour, mais sur le résultat du match, comme tous !
20h40 : Nous commandons 4 mixtos et un coca, en plein épisode de ‘A Favorita’, la tele-novela du moment. Soudain, moment dramatique à l’écran. Du coup, le cuisinier de notre mixto sort en vitesse de sa cuisine pour regarder la scène, délaissant nos tranches de pain sur le grill. Tant pis, nos mixtos seront brûlés ! Il faut savoir gérer les priorités…
20h57 : qui nous invite à passer quelques jours dans son village au Pérou. Quand, avec toute la diplomatie possible, nous tentons de lui expliquer que ce sera dur de venir le voir, car en plus du manque de temps, son village se situe dans une région peu accessible, il éclate de rire. Comment ça ? Peu accessible ?! Pas du tout ! Il suffit, à partir d’Iquitos (accessible uniquement en avion ou après une semaine de bateau), de remonter le fleuve pendant 3 jours puis de faire 36h de bus et enfin marcher une demi-journée ! C’est simple ! Tout à fait accessible !
22h50 : Le match s’achève. Au fin fond de l’Amazonie, les singes entendent une clameur d’insultes qui recouvrent le ronronnement du moteur de cet engin flottant sur le fleuve. 0 – 0. Même si le Brésil a dominé, les attaquants – ces nuls – ont manqué de réalisme. Poa ! Merde ! Peu importe, ils seront tous devant leur écran pour le match suivant…
23h20 : Apres avoir réveillé les rares dormeurs, les spectateurs du match se couchent tandis que certains irréductibles refont le match en regardant les reflets de la lune jaune sur le fleuve. Dans l’ombre, quelques couples se forment.
JOUR 6
10h02 : Arrivée à Sao Paulo de Olivenca. Encore une halte de déchargement Nous faisons un petit tour dans le village. Catherine se fait interpeller dans la rue (‘Belleza », ‘Mi amor’) par des hommes imbibés par l’alcool et qui font peine à voir. Une petite maison de bois fait office de bar, et, à en juger par la musique, également de boite de nuit. 1h30 de déchargement annoncé.
14h22 : Apres avoir déjeuné, nous tentons une petite douche pour nous rafraîchir face à la chaleur qui assomme l’ensemble des passagers (y compris équipage qui décharge visiblement : après 4h, ils en sont toujours en plein milieu de leur travail). Apres 5 jours, se doucher ou aller aux toilettes (même cabine) relève d’un exercice d’apnée prolongée. Mais que l’eau fait du bien !
15h01 : Catherine monte sur le pont. Elle décide, à l’image de ses copines péruviennes, de se faire faire une pédicure/manucure avec esthéticienne. En moins de 15mn, elle est entre de bonnes mains.
15h46 : Fin de la première couche de vernis. Le rose est très flash. Il va falloir s’y faire…
15h57 : Début de l’œuvre d’art…L’esthéticienne peint de véritables Picasso sur chaque doigt. Quelle précision ! Quelle application ! Quant au résultat, c’est une question de mode probablement. Ca arrivera chez nous pour sur… dans 40 ou 50 ans…
6h10 : Début de la pédicure. Cette fois ci, c’est une véritable œuvre en 3D que notre artiste exécute. Presque une sculpture. Elle incruste un faux diamant sur l’orteil de Catherine. Charmant !
16h58 : Ca y est ! C’est fini (2h tout de même). Catherine va pouvoir parader avec ses toiles à 3 reals à chaque doigt. En tous cas, elle compare avec ses copines, qui en profitent pour la complimenter, mais surtout lui raconter leur vie.
18h10 : Une pirogue approche, et soudain, tel un bateau pirate, des passages sautent à l’abordage de notre cargo. Ils prennent juste le bateau en route. Pas besoin de arrêter pour si peu.
20h20 : Bizarrement, nous sommes soudain envahis de moustiques. Le bateau a du ralentir, car sa vitesse empêchait jusqu’alors à ces derniers de nous suivre, alors qu’ils foisonnent dans les eaux blanches du Rio Solimoes. Ca ne semble pas déranger les nombreuses araignées qui attendent leur heure, ni non plus les quelques couples qui ne descotchent pas de leur hamac et profitent de la dernière nuit sur le bateau, en toute intimité…
JOUR 7
6h11 : Les hamacs commencent déjà à se détacher un a un, soulevant des tourbillons de poussière et révélant la salete du sol. Bal d’immondices. Tant de déchets en si peu de temps !
6h52 : Devant la rumeur qui annonce notre arrivée imminente, nous nous mettons à notre tour à décrocher nos hamacs. Ca sent bon le parfum, et les femmes se pomponnent. Elles sont vêtues tout en strass et en paillettes comme si elles sortaient ce soir. A n’en pas douter, un mari, ou un amant, les attend à Tabatinga.
7h47 : Toujours rien
8h32 : Toujours rien
9h57 : Ca y est, nous arrivons enfin en vue de Tabatinga, a la frontière de 3 pays (Brésil, Pérou et Colombie), mais surtout ville perdue sur l’Amazone, au milieu de la foret. Nous aurons apprécie voyage enivrant, permettant de pénétrer des contrées reculées, souvent mystérieuses, toujours magnifiques (quels couchers de soleil !). Cela est surtout l’occasion de partager une tranche de vie de ces gens loin de tout, pour qui le temps n’a pas la même échelle que chez nous.
Quoiqu’il en soit, découvrez nos photos de ce périple à travers l’Amazonie dans notre album photo du Brésil http://phileasblog.canalblog.com/albums/bresil/index.html